NEW YORK – Rolando Romero était d’humeur contemplative.

D’ordinaire rapide avec les blagues, Romero souhaitait ce matin-là parler de l’importance de la thérapie, presque comme s’il venait de terminer une séance avec la femme qu’il crédite pour l’avoir aidé à sortir d’une profonde dépression l’an dernier.

Le boxeur populaire surnommé « Rolly » se trouvait à plus de 20 étages au-dessus du chaos de Midtown Manhattan, venu parler de son combat très médiatisé contre son rival largement favori, Ryan Garcia, vendredi soir à Times Square.

Romero, alors dans une phase de réflexion, voulait surtout évoquer comment il avait sombré en 2024 au point le plus bas de ses 29 années sur Terre.

Les combats en pay-per-view contre Gervonta Davis et Isaac Cruz lui avaient apporté la liberté financière qu’il poursuivait depuis l’enfance. Pourtant, le natif de North Las Vegas avait appris à la dure que le vieil adage était vrai : l’argent n’achète pas le bonheur.

« L’année dernière a été vraiment difficile pour moi », a confié Romero à The Ring. « Ça a vraiment commencé en décembre 2023. Je luttais contre mes propres démons. J’essayais de devenir un meilleur homme pour moi-même. Et je crois que je me suis un peu submergé avec tout ça. »

Romero n’a pas donné de détails précis, mais sa défaite par KO contre Davis en mai 2022, et l’épreuve judiciaire qu’il avait traversée quelques mois plus tôt — après qu’une femme qu’il connaissait l’avait accusé d’agression sexuelle — ont aggravé des problèmes personnels non résolus depuis des années. Même s’il aimait être entouré de sa famille et échanger avec les fans à Las Vegas, l’ancien champion WBA des super-légers ressentait un vide.

Une amie thérapeute agréée l’a mis en relation avec une collègue qu’elle pensait idéale pour Romero. Cette aide lui a permis de sortir d’une année marquée par une défaite par TKO technique face à Cruz, qui l’a dominé jusqu’à l’arrêt au 8e round il y a 13 mois à la T-Mobile Arena de Las Vegas.

« C’est une excellente thérapeute », a déclaré Romero. « On a parlé de plein de choses que j’ai connues en grandissant, et de plein d’idées que je pensais normales. Vous savez ? Peu importe ce que les gens disent : “La thérapie, c’est pour les faibles”, tout ça. Non, être capable d’admettre qu’on a un problème, ça fait de vous un putain d’homme. »

Sa propre évolution a rendu Romero plus empathique que jamais envers le rival qu’il tentera de mettre KO en direct lors de la soirée FATAL FURY: City of the Wolves organisée par The Ring.

Romero a observé de loin la descente aux enfers de Garcia hors du ring, avant et après son combat contre Devin Haney, il y a un an au Barclays Center de Brooklyn. Le comportement parfois étrange de Garcia pendant la promotion du combat avait amené ses proches, ses fans, les journalistes et Haney lui-même à douter de sa santé mentale.

Garcia avait pourtant livré une performance exceptionnelle, envoyant Haney au tapis trois fois pour s’imposer par décision majoritaire le 20 avril. Ce qui aurait dû être une victoire de prestige a été annulé après un test antidopage positif à l’Ostarine.

Le très controversé Garcia a ensuite été suspendu un an et condamné à une amende de 1,2 million de dollars pour la présence de cette substance interdite dans son organisme. Il avait déjà perdu 1,5 million de dollars de sa bourse en raison de son surpoids de 3,2 livres au-dessus de la limite des super-légers.

Garcia estime que son « réveil » s’est produit dans un hôtel de Beverly Hills le 8 juin.

Il avait été arrêté et inculpé pour avoir causé environ 15 000 $ de dégâts à sa suite du Waldorf Astoria. L’accusation a ensuite été abandonnée.

Avant son explosion verbale lors de la conférence de presse mercredi soir à Manhattan Center, un Garcia plus calme et mature s’était montré plutôt terne durant la promotion du combat.

Romero a remarqué que Garcia avait « beaucoup mûri » depuis l’an dernier. Informé de la transformation de Romero grâce à la thérapie, Garcia a salué son adversaire.

« Beaucoup de boxeurs ont des problèmes de santé mentale », a confié Garcia à The Ring. « C’est un sujet tabou dans le monde de la boxe. On se frappe à la tête à longueur de journée. Ça finit par peser sur toi. Donc, je pense que c’est bien qu’on se soucie les uns des autres, tout en gardant l’esprit de compétition. »

« Entre nous, ça a toujours été une rivalité amicale, à se taquiner. C’est pourquoi je ne ressens aucune animosité envers lui. C’est un mec cool. Je pense qu’on va livrer un grand combat. Je vais le battre, mais je ne ressens aucune haine. »

Romero se souvient avoir appelé Garcia après que celui-ci s’était retiré d’un combat prévu contre Javier Fortuna en avril 2021 pour se concentrer sur sa santé mentale.

Sceptique à l’époque, Romero avait pensé que Garcia « racontait des conneries ». Mais il a vite compris que les souffrances de Garcia étaient bien réelles.

« Je me souviens que j’étais à l’entraînement pour affronter [Anthony] Yigit [en juillet 2021] », a raconté Romero. « Et là, j’ai eu comme une révélation : “Ce mec ne ment pas.” Je lui ai envoyé un message, il m’a répondu. Il pensait que j’allais le troller. Mais je lui ai dit franchement : certaines choses sont plus importantes que la boxe. Il m’a donné son numéro, on a parlé. Il ne m’a pas raconté ses problèmes, mais je voyais dans ses yeux ce qu’il traversait. »

« Ce jour-là, la dynamique a changé. Il n’y avait plus de vraie haine. J’étais déjà champion du monde par intérim. J’étais n°1 mondial. J’étais en route vers un super-combat [contre Davis]. Et là, toute la haine que j’avais envers Ryan a disparu. Juste après, j’ai commencé à le soutenir. Parce que je savais ce qu’il avait vécu. Je suis le seul boxeur qui l’a soutenu dans tout ce merdier. Tout le monde se moquait de lui, mais qui était là ? Moi. »

Leonard Ellerbe, ancien PDG de Mayweather Promotions, n’était pas surpris d’apprendre que Romero avait tendu la main à Garcia.

« Rolly est de loin le boxeur le plus gentil que j’ai rencontré », a déclaré Ellerbe. « On a une relation particulière. Il m’appelle encore souvent pour prendre de mes nouvelles. C’est le seul à le faire. »

Ellerbe avait aidé Romero à se relever après sa défaite contre Davis en mai 2022 au Barclays Center.

Cette défaite était survenue quatre mois après que la police de Henderson (Nevada) avait classé l’enquête sur l’agression présumée. Romero n’avait jamais été inculpé, mais l’affaire avait poussé Mayweather Promotions à le remplacer par Cruz en octobre 2021 pour affronter Davis.

Romero a finalement eu sa chance contre Davis, mais il n’avait pas affronté le traumatisme ni le stigmate de cette accusation avant d’entamer une thérapie.

« Ça aussi, ça m’a beaucoup affecté », a-t-il avoué. « En réalité, on m’a volé ma chance pour rien. Mais c’est arrivé. Je suis juste reconnaissant d’être là aujourd’hui. »

Romero (16-2, 13 KOs) a suivi moins de séances de thérapie pendant sa préparation pour ce combat contre Garcia (24-1, 20 KOs, 1 NC), prévu dans l’un des lieux les plus emblématiques du monde. Il compte reprendre les séances régulièrement après leur affrontement pour le titre WBA « secondaire » des poids welters, en clôture d’une soirée diffusée en pay-per-view sur DAZN à partir de 17h ET (59,99 $ aux États-Unis).

« Évidemment, tout le monde a des blessures d’enfance », a déclaré Romero. « Je suis passé de rien à beaucoup très vite, et ça en perturbe plus d’un. Je pense que tout le monde dans la boxe reconnaît que j’ai bien géré la célébrité. Mais ça ne veut pas dire que tout ça ne t’affecte pas. Un jour tu comptes tes dollars, et le lendemain tu es riche… mais avec les mêmes traumatismes et le mode survie encore activé. »

« Faire face à tout ça — les changements, la célébrité — c’est lourd. Et on le voit chez beaucoup de boxeurs : ils ne sont plus les mêmes quand ils atteignent ce niveau. »